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TEMOIGNAGE : « cinq ans que mon mari ne me touche pas »

Qu’on soit pour ou contre la polygamie, on est obligé d’admettre que cette dernière revêt parfois des conséquences fâcheuses. On en a du moins l’illustration avec le témoignage qui suit. Mariama Sow, aujourd’hui âgée de 36 ans, a vécu, dirions-nous une vie de couple relativement épanouie durant une vingtaine d’années. Période au cours de laquelle elle et son mari ont eu sept enfants. Mais il y a cinq ans, la maladie de madame servant de prétexte à son mari, ce dernier s’est marié. Et depuis, la bonne humeur et la sérénité se sont envolées. Du reste, Mariama Sow et ses enfants. Au point que la jeune dame, obligée de faire la femme de ménage pour nourrir ses nombreux enfants, confie n’avoir pas eu une seule relation intime avec son époux, depuis cinq longues années. Un enfer qu’elle dit endurer en silence pour ne pas laisser ses enfants, trop vulnérables, à la merci de leur père et de sa femme, littéralement devenus leurs ennemis.

« Marié à l’âge de 12 ans »

« Je me suis mariée à Gaoual en 1995 alors que je n’avais que 12 ans. A l’époque, j’avais trois prétendants, j’ai finalement choisi Alimou Diallo, un cousin par alliance qui habitait Conakry. Quelques jours après le mariage, nous sommes venus vivre à Conakry. On faisait tout ensemble. Je ne mangeais pas sans lui et lui non plus. Nous avons vécu comme cela 20 bonnes années. Je lui ai fait 7 enfants dont 3 garçons 4 filles. Après la naissance de mon dernier enfant, je suis tombée gravement malade.  Nous avons recouru à la fois à la médecine moderne et traditionnelle.  Mais en vain. Il n’y avait pas d’amélioration.  J’ai été alitée pendant 3 ans. J’avais même failli devenir folle.  Il m’arrivait en effet de crier au milieu de la nuit. J’hallucinais ».

« Six mois plus tard, j’avais une coépouse »

« Toute la famille en était venue à perdre l’espoir de me voir rétablie. On me croyait condamnée.  Les sœurs de mon mari ont décidé de lui trouver une seconde femme, « pour s’occuper de lui », ont-elles dit. Nous habitons Kobayah dans un appartement à trois pièces et un salon. L’appartement est reparti ainsi qu’il suit : la chambre conjugale, la chambre des enfants et la chambre des visiteurs. Six mois après les premières propositions de mes belles-sœurs, j’avais une coépouse et les choses allaient changer. Quand elle est arrivée,  elle a occupé  la chambre préalablement  réservée  aux visiteurs. Notre mari faisait la navette entre nos chambres, 3 nuits chez chacune. Navette de courte durée, dirais-je »

 Cinq ans… 

« En visite chez nous pour quelques mois, ma belle-mère s’est installée dans la chambre des enfants qui ont donc été obligé de me rejoindre dans la mienne. Quant à mon mari, il en a profité pour déménager définitivement dans la chambre de ma coépouse. Il y est resté en effet même après le départ de sa mère. Même quand les enfants sont retournés dans leur chambre, il n’est plus revenu chez moi. Conséquence, cela fait exactement 5 ans que je n’ai pas eu de relation intime avec lui. Il ne me voit même pas comme son épouse. Pourtant, en ce qui me concerne, je continue à lui faire la cuisine, à lui chauffer de l’eau pour son bain, à faire sa lessive, etc.  Mais lui m’ignore et me jette à peine le regard même quand je suis malade. Voilà en quoi se résume notre relation depuis l’arrivée de sa 2ème femme ».

« Aucune aide financière. En plus, il me rend la vie difficile »

« Aujourd’hui, je vais mieux et je travaille comme femme de ménage à Cobayah. Les dimanches, je fais la lessive pour d’autres femmes et cela m’aide à me faire un peu d’argent. Mais il m’intime d’arrêter ce travail, sinon il me ramènerait chez mes parents.  Il a une petite fabrique de brique à Hamdallaye et ne s’en sort pas mal. Mais ne me donne rien. En rentrant le soir, il revient avec plusieurs sachets, de la nourriture, des canettes de jus, d’autres petits cadeaux.  Mais tout est destiné à ma coépouse qui n’a pourtant qu’un seul gosse. Il lui a même ouvert une petite boutique de d’alimentation générale.  Mes enfants et moi ne comptons plus pour lui. Les plus grands commencent à le haïr et prennent souvent ma défense quand il me menace. On a fait plusieurs assises dans la famille.  Chaque fois, il reconnait son tort et promet de changer, mais ne le fait pas.  Certaines fois, quand je pense à ce que je vis, j’ai envie de retourner chez mes parents, mais où partir avec 7 gosses dont le plus âgé n’a que 24 ans. Mes enfants étudient ici et je n’ai pas les moyens de m’occuper d’eux toute seule ».

« Ça fait très mal, mais j’essaie de vivre pour mes enfants »

« Je suis souvent en rage contre moi-même. En effet, comment puis-je accepter avec un mari avec qui je n’ai pas de relation intime depuis cinq ans ? Pourtant, ce n’est pas que je suis insensible ou que je n’ai pas des envies et des désirs comme tout être humain. J’avoue que c’est pénible.  Je ne crois pas qu’une autre femme aurait accepté une telle situation. 

Heureusement que j’ai déjà mes enfants, et je compte garder courage et rester pour les éduquer. Aujourd’hui, j’essaie de vivre pour mes enfants. 

Je maudis la polygamie. Tout allait bien avant l’arrivée de cette femme qui, j’en suis sûre, a envoûté mon mari. Elle me déteste moi et mes enfants. Elle nous accuse de choses qu’on n’a pas faites. Cela fait plusieurs fois que mon mari me bat, m’insulte, moi mais aussi mes parents, à cause d’elle.  J’ai parfois l’impression d’être maudite ».

Quelles conséquences ?

A la suite du témoignage de Mariama Sow, nous avons contacté Dr.  Pema Koïvogui, médecin gynécologue, pour évaluer avec lui les conséquences d’une privation si prolongée de relation sexuelle au sein d’un couple. Et pour lui, les conséquences se situent à deux niveaux. Premièrement, sur le plan psycho-social, dit-il, « une femme qui est privée de sexe, surtout quand elle y est habituée et en a envie, a tendance à s’isoler et à devenir dépressive. Cela pourrait provoquer chez elle un stress qui par conséquent va produire de l’acide chlorhydrique dans l’estomac et cela va aboutir à une gastrique qui, non prise en charge, pourrait se transformer ulcère gastrique ».

Deuxièmement, sur plan gynécologique, poursuit le médecin, « il convient de rappeler que malgré l’arrêt de rapport sexuel, l’ovaire continue à produire deux types d’hormones qui sont les estrogènes et la progestérone. L’excès de ces hormones sur les tissus de l’utérus peut favoriser la formation de myomes, de fibromes et même provoquer une ménopause précoce ».

Qu’en dit l’Islam ?

La rédaction du Djely a également pris attache avec El Hadj Doumbouya, imam à la mosquée de Dabondy. Le religieux tient tout d’abord à faire savoir qu’il y a des obligations mutuelles entre les conjoints. Des obligations qui font que chacun doit faire attention à l’attitude à adopter vis-à-vis de l’autre, au risque d’écoper de péchés. Si l’Islam autorise la polygamie, l’imam, citant le prophète Mahomet (PSL), note néanmoins : « tout homme qui ne sera pas équitable et juste envers ses épouses arrivera à Dieu le jour du jugement dernier, paralysé ». Et dans les relations qu’un époux polygame doit avoir avec ses femmes, poursuit l’imam, « normalement même le nombre de jours que l’homme doit passer chez chacune des épouses doit être déterminé par les épouses elles-mêmes après des pourparlers entre elles, et non par l’homme ».

Et quand on a demandé à l’imam ce qu’il pensait du fait que Alimou Diallo n’ait pas eu de relation intime avec son épouse depuis cinq ans, sa réponse est la suivante : « il faudrait demander à ce mari sur quoi il se base, parce que ce n’est pas accepté en islam. Si cette femme a raison, il faudrait que cet homme se remette en question ».

 Aux yeux du religieux, il reste néanmoins à Mariama Sow l’option du divorce. Encore que l’imam tient à faire savoir que « toute femme qui demande le divorce à son mari sans aucune raison valable ne rentrera pas au paradis ». Mais il pense déjà qu’une « femme que son époux n’a pas touché pendant cinq ans a une raison   suffisante pour demander le divorce ». Notamment, dit l’imam, parce que « si elle reste dans ce foyer et trompe son époux elle aura des péchés ».

Asmaou Diallo

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