Les membres du Comité national du rassemblement pour le développement (CNRD) et du gouvernement Goumou sont plutôt nouveaux dans la gestion au plus haut sommet de l’Etat. Pour autant, la stratégie…politicienne, ça les connait visiblement. C’est en tout cas l’impression qui se dégage de la gestion qu’ils font du nouveau rapport de force avec les Forces vives de Guinée (FVG). Conscient qu’il n’était pas nécessairement en meilleure posture à la veille de la manifestation initialement projetée le 9 mars dernier, le CNRD envoie coup sur coup le premier ministre, Bernard Goumou, et les leaders religieux, négocier un répit. Ce dernier obtenu, les autorités s’emploient désormais à le bonifier. Et c’est l’activiste, Abdoul Sacko, interpellé le samedi dernier que l’on entend utiliser pour y arriver.
Coïncidence troublante
Quand, le samedi 11 mars 2023, comme une trainée de poudre, l’information relative à l’interpellation du responsable du Forum des forces vives de Guinée (FFSG) et de son camarade de lutte, Ismaël Diallo, s’est répandue dans la cité, tout le monde a pensé à un impair dicté par le camp des faucons du régime. Mais et si tout cela renvoyait plutôt à une stratégie bien huilée et dont l’objectif serait de saborder les discussions avec les Forces vives, tout en enlevant à ces dernières le moyen d’agir de sitôt ? En tout cas, devant l’émoi suscité, Abdoul Sacko et Ismaël sont autorisés à rejoindre leurs domiciles respectifs au bout de quelques heures seulement. Mais ils ne sont pas quittes pour autant, vu qu’il est demandé notamment au premier de se présenter hier lundi à la Direction centrale des investigations judiciaires. Ce même lundi au cours duquel le premier ministre est censé rencontrer une délégation des Forces vives pour débattre de leurs préalables. Une coïncidence ? Elle serait plutôt troublante alors.
Echec humiliant du PM
Malgré tout, Dr. Bernard Goumou et les émissaires des Forces vives se retrouvent peu avant midi au Centre islamique de Donka, sous l’égide des leaders religieux. Mais très vite, la question Abdoul Sacko revient dans le débat et se mue en un préalable supplémentaire. Le chef du gouvernement décroche son téléphone et passe des coups de fil, dit-on pour essayer de « débloquer la situation ». En vain. Devant cet échec aussi surprenant qu’humiliant, les parties ne peuvent discuter. On se quitte donc pour se retrouver…quand ? Personne ne le sait. Les retrouvailles étant conditionnées à la « clarification » du cas de l’activiste du Forum des Forces sociales.
Un long répit…
Mais cette condition, le CNRD s’en saisit plutôt comme une opportunité. On s’en sert pour jouer sur la montre et l’agenda. De ce point de vue, ce n’est pas anodin si dans la soirée, on annonce qu’Abdoul Sacko et remis entre les mains de ses avocats, en attendant la poursuite de son audition le vendredi prochain. Les acteurs des Forces vives sont pris au piège. Avec l’espoir suscité par la rencontre d’hier lundi, ils n’ont pas eu le temps de suffisamment préparer la manifestation qui était reprogrammée demain mercredi. Or, après cette date, il devient pratiquement impossible de faire tenir une autre manif avant le début du ramadan. Un long répit dont peut profiter le CNRD, pour se réorganiser et inverser le rapport de force.
Boubacar Sanso Barry