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Guinée : acquittement d’Oumar Sylla et Ibrahima Diallo dans un contexte toujours délétère

L’acquittement le 13 juin 2023 des défenseurs des droits humains Oumar Sylla et Ibrahima Diallo est une bonne nouvelle. Pour autant, cette décision n’occulte pas la situation intenable de la société civile guinéenne, restreinte dans ses libertés. La junte  doit garantir les libertés publiques dans le pays, en premier lieu la liberté d’association et d’expression.

Paris, Genève, le 15 juin 2023. Neuf mois de détention arbitraire, d’incertitude, et puis l’espoir. Le 13 juin 2023, le Tribunal de première instance de Dixinn, délocalisé à la Cour d’Appel de Conakry pour l’occasion, a prononcé l’acquittement d’Oumar Sylla, alias Foniké Menguè, coordinateur du Front National pour la Défense de la Constitution (FNDC) et coordinateur adjoint de Tournons La Page (TLP) Guinée et d’Ibrahima Diallo, coordinateur de TLP-Guinée et responsable des opérations du FNDC. Ils étaient tous deux poursuivis pour « participation délictueuse à un attroupement », « complicité de destructions d’édifices publics et privés » et « complicité de coups et blessures volontaires ». Le jour-même, le procureur de la République a interjeté appel du jugement.

Cet acquittement intervient un peu plus d’un mois après la libération, dans la soirée du 10 mai 2023, des deux défenseurs des droits humains. Le 30 juillet 2022, MM. Sylla et Diallo avaient été brutalement arrêtés après les manifestations des 28 et 29 juillet 2022 organisées par le FNDC. Des manifestations violemment réprimées, engendrant plusieurs morts. Les deux activistes ont par la suite été inculpés et placés sous mandat de dépôt à la maison centrale de Conakry. Mamadou Billo Bah, responsable du pôle jeunes de TLP-Guinée et de la mobilisation et des antennes du FNDC, arbitrairement arrêté le 21 janvier 2023 pour les mêmes infractions que MM. Sylla et Diallo mais poursuivi dans le cadre d’un autre dossier, a été relâché en même temps que ses deux collègues. Il attend toujours son procès.

Une procédure irrégulière, une détention brutale, un contexte délétère

La procédure à l’encontre des trois défenseurs des droits humains a été entachée d’innombrables irrégularités. Les trois activistes ont été arrêtés brutalement par des militaires encagoulés et lourdement armés, qui ne leur ont pas dit où ils les emmenaient. En détention, ils n’ont pas eu accès aux soins. Ils en portent encore les séquelles.

Le délai légal de détention préventive en Guinée est fixé à quatre mois, renouvelable une fois. Celle d’Oumar Sylla et Ibrahima Diallo n’a pas été officiellement renouvelée à l’issue de la première période de quatre mois, avant de dépasser le délai maximum de huit mois. De plus, le 1er juin 2023, Ibrahima Diallo a été retenu à l’aéroport de Conakry et empêché de quitter le territoire guinéen, sans qu’aucune mesure de contrôle judiciaire n’ait pourtant été prononcée à son encontre lors de sa libération.

Les libertés fondamentales sont quotidiennement bafouées par le pouvoir en Guinée. En mai 2022, les manifestations ont été interdites. En août 2022, la junte s’est attaquée à la liberté d’association, en dissolvant arbitrairement le FNDC. Depuis lors, les autorités refusent systématiquement les demandes de renouvellement d’agrément aux associations membres du FNDC.

Si l’Observatoire se réjouit de l’acquittement d’Oumar Sylla et d’Ibrahima Diallo, il rappelle qu’ils n’auraient jamais dû être détenus en premier lieu et que la procédure ne visait qu’à les sanctionner pour leur défense légitime des droits humains. L’Observatoire appelle la junte militaire à abandonner toutes les poursuites à leur égard, ainsi qu’à l’encontre de Mamadou Billo Bah et à leur garantir, ainsi qu’à l’ensemble des défenseur·es des droits humains dans le pays, un environnement propice, sans menaces ni crainte de représailles.

L’Observatoire appelle également la junte militaire au pouvoir à garantir l’indépendance de la justice, ainsi que les droits à la liberté d’expression, de réunion pacifique et d’association dans le pays, conformément aux engagements internationaux de la Guinée, notamment au titre des Articles 19, 21 et 22 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques et des Articles 9, 11 et 10 de la Charte Africaine des Droits de l’Homme et des Peuples.

FIDH – Fédération internationale pour les droits humains

OMCT – Organisation mondiale contre la torture

dans le cadre de leur programme commun :

 L’Observatoire pour la protection des défenseur⋅es des droits humains

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