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Financement de la PF : la Guinée explore la piste des ressources endogènes

A l’instar d’autres pays africains, la Guinée est engagée depuis des années dans un processus visant à garantir les droits sexuels et reproductifs de sa population. Ce qui passe notamment par la planification familiale (PF) comme moyen visant à maintenir la santé et le bien-être des femmes et de leurs familles. Ce qui s’est traduit par un timide progrès du taux d’utilisation de la contraception moderne. Mais en réalité, en la matière, le pays éprouve d’importants besoins non satisfaits en PF (22%). Et un des facteurs explicatifs résident dans le déficit de ressources pour financer la planification familiale. Les ressources mises à disposition par l’Etat et les partenaires techniques et financiers (PTF) ne suffisant pas toujours à couvrir les besoins.  Et c’est pourquoi des démarches sont en cours pour essayer d’impliquer les collectivités locales dans ce financement, avec l’objectif que cela permettra d’atteindre l’objectif de 25% de taux d’utilisation de la contraception d’ici 2030.

Selon le dernier recensement général de la population et de l’habitat de 2014 (RGPH4), la Guinée compte 10 523 361 habitants. Avec un taux de croissance annuelle de 2,9%, la projection de la population en 2022 se chiffrait à 13 261 638 habitants. Une explosion démographique en total décalage avec le développement socio-économique.  D’où la nécessité de travailler à promouvoir la planification familiale. Car chaque jour, dans ce pays, ce sont 6 femmes qui meurent en donnant la vie, soit 2190 vies perdues par an. 27 nouveaux nés meurent également chaque jour, ce qui équivaut à 9 855 pertes annuelles. Au-delà de cette mortalité maternelle et infantile, de nombreuses filles sont obligées d’abandonner l’école à cause des grossesses non désirées, non planifiées ou à risque, vu le taux de prévalence qui était à 11% en 2018, selon l’Enquête Démographique et de Santé 2018. Leur santé ainsi que celle de leurs enfants restent fortement vulnérables.

Au vu de ces chiffres alarmants, il est plus qu’urgent d’investir dans la PF en Guinée. L’Etat consent un effort d’un million de dollars annuels – 8,6 milliards de francs guinéens – pour l’achat des produits contraceptifs au niveau central. Les partenaires bi et multilatéraux eux aussi sont très présents pour aider à réaliser les programmes et activités dans le domaine de la planification familiale, en vue d’améliorer le taux de prévalence de la contraception moderne. Mais pour rendre optimal la planification familiale, les besoins sont estimés à plus de 160 milliards de francs guinéens, selon le Plan d’action national budgétisé pour la période 2019-2023.

Il y a donc un déficit qu’il est d’autant plus difficile à combler que la conjoncture financière internationale n’est pas très favorable. C’est pourquoi l’Etat et ses partenaires explorent la piste d’une mobilisation des ressources internes, afin de pouvoir répondre aux besoins croissants d’une population grandissante. Pour donc y arriver, autorités et partenaires comptent inciter les collectivités locales à s’impliquer davantage dans la prise en compte de la planification familiale. La démarche étant d’autant plus pertinente que ce sont les zones rurales qui sont les plus affectées par les défis sanitaires.

Concrètement, à l’occasion de « l’atelier appui à l’accroissement des ressources des communes et collectivités locales en faveur de la Planification familiale en Guinée », organisé à Kindia du 15 au 19 novembre 2022, avec l’appui conjoint de l’UNFPA et de l’Etat Guinéen, plusieurs élus locaux et administrateurs territoriaux avaient été outillés à l’idée d’impliquer davantage leurs collectivités respectives au processus de financement de la planification familiale. Au point qu’au terme de la rencontre, ils s’étaient engagés à allouer 2 % du budget communes réservé à la santé (15 %), aux services de planification familiale. Par ailleurs, ils avaient tous promis d’explorer toutes les pistes susceptibles de contribuer à la mobilisation des ressources additionnelles en faveur de la planification familiale. « Nous devons assurer une augmentation des ressources locales allouées à la planification familiale. Nous ne pouvons pas le faire sans les représentants de la communauté. C’est pourquoi, nous avons des actions de plaidoyer en direction des élus locaux, qui sont les représentants légitimes des populations à la base. Aujourd’hui, nous travaillons avec les communes pour qu’elles mettent 2% de leur budget alloué à la santé, aux programmes de planification familiale », nous a confié Dr. Diouga Diallo, de l’UNFP. Selon lui, à date, « un peu plus d’une dizaine de commune ont pris la décision d’allouer 2% de leur budget de la santé à la PF. Nous sommes sur le processus d’endossement officiel de cet engagement. Une des communes a déjà commencé à financer cette ligne de 2% dans la région de Labé ».

Au nombre des communes en passe de traduire l’engagement sur le terrain, on Tolo, une commune rurale relevant de la préfecture de Mamou. De retour de l’atelier de Kindia, le maire a d’abord sensibilisé ses pairs et ses concitoyens, en vue de la prise en compte de l’ampleur de la problématique. Et cela a donné des résultats fort encourageants. « Nous avons fait notre session le 9 septembre dernier. La majeure partie des conseillers était là, les sages, les présidents de districts étaient conviés. Nous en avons parlé et nous avons voté à presque 100%. Tout le monde était d’accord d’affecter 2% du budget de la santé à la planification familiale », a assuré Elhadj Thierno Madjou DIALLO, Maire de Tolo.

A Missamana, commune rurale relevant de la préfecture de Kankan, le processus a par contre connu un léger retard car le Plan d’Investissement Annuel (PAI 2023) était déjà élaboré. Toutefois, après une sensibilisation de toutes les couches concernées, une réunion préliminaire a eu lieu le mois d’aout dernier. « Tous les conseillers se sont engagés pour le respect de l’engagement dans l’exercice 2024. Donc, le 30 septembre 2023, la loi a été votée et acceptée dans la salle d’inauguration avec les conseillers. A partir du 1er janvier 2024, la situation sera mise en action. Les 2% qu’on va réussir à dégager, ce sera pour 2024 », a promis le maire, Konaté Saran Mady. Là, les autorités espèrent obtenir d’ailleurs plus de ressources financières afin d’augmenter le montant des 2%.

Sur l’utilisation de ces montants, les deux communes comptent les consacrer à la sensibilisation et à l’achat des contraceptifs, en attendant l’appui possible d’autres partenaires externes. Dans les deux collectivités, les responsables entendent compter s’appuyer sur le Comité de suivi de la santé et de l’hygiène (CAUSA), l’outil d’administration de la commune au sein des centres de santé. Représentant de la commune au sein de la structure sanitaire, c’est le responsable du CAUSA qui veille à la bonne administration du centre de santé et en rend compte à la commune.

Quoique prometteuse et plutôt innovante, l’initiative se heurte néanmoins à quelques obstacles. Au nombre desquels il y a que dans certains cas, les compétences en matière de santé ne sont pas totalement transférées aux collectivités locales. Parce qu’il faut dire que le code révisé des collectivités locales, en son article 7, qui explique le rôle que doivent jouer les collectivités locales pour la mobilisation des ressources en faveur de l’accès des communautés aux services de santé en général, et particulièrement ceux de la PF. « On nous a dit qu’on nous a transféré les compétences. En principe, c’est fait. Mais jusqu’à présent, les conditions financières n’ont pas encore suivi. Quand on nous transfère par exemple la santé, il faut que les moyens financiers suivent mais jusqu’à présent, ce n’est pas le cas », a fait remarquer le maire de Tolo.

Dans d’autres cas, ce se sont les responsables à la tête des centres de santé qui ne savent pas qu’ils relèvent des autorités municipales et non de l’administration déconcentrée. D’où le besoin d’un travail de vulgarisation des textes et de renforcement des capacités du personnel sanitaire au niveau local.

Elisabeth Guilavogui

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