Alors que le président de la transition a décrété la gratuité de l’extrait d’acte de naissance, du jugement supplétif et de la carte nationale d’identité biométrique, dans le cadre de l’initiative « Une Guinée, une identité juridique et numérique », la réalité sur le terrain est tout autre. À N’Zérékoré, l’obtention de ces documents, en particulier l’extrait de naissance, reste un véritable parcours du combattant et un service monnayé.
Dans la commune urbaine de N’Zérékoré, les citoyens désireux de se faire enrôler dans le cadre du Programme National de Recensement Administratif à Vocation d’État Civil (PN-RAVEC) doivent impérativement fournir un extrait d’acte de naissance. Or, pour entrer en possession de ce document censé être gratuit, beaucoup se voient contraints de payer la somme de 35 000 francs guinéens.
Plusieurs citoyens rencontrés à la mairie ont confirmé cette situation, mais préfèrent rester anonymes, craignant des représailles. L’une d’elles raconte.
« J’ai couru derrière mon extrait de naissance pendant plus de sept jours, sans succès. Finalement, un parent m’a conseillé de contacter un agent de la commune contre 35 000 GNF. J’ai payé, et quelques heures plus tard, on m’a appelée pour récupérer le document. C’est comme ça que j’ai pu me faire recenser », a-t-il expliqué.
Dans certains lieux de recensement, une autre pratique s’installe : les agents eux-mêmes proposent des extraits de naissance déjà signés et cachetés. Il ne reste qu’à y inscrire les informations du demandeur… après paiement, bien sûr.
Junior, un jeune de la ville, témoigne : « Je n’avais aucune connaissance à la mairie. Après deux jours de va-et-vient, je suis allé sur un site de recensement à Onah. Là, on m’a remis un extrait déjà prêt. Il ne manquait que mes informations. J’ai payé 35 000 FG, et tout s’est fait sur place, y compris l’enrôlement ».
Ces pratiques, bien qu’illégales, deviennent la norme. Elles sont perçues comme des « raccourcis » efficaces, là où la voie officielle – gratuite – est marquée par des lenteurs administratives et des renvois à répétition. Ceux qui refusent de payer se voient souvent priés de « revenir demain », sans garantie de succès.
Alors que la date butoir du recensement approche à grands pas, la question reste posée : faut-il patienter indéfiniment dans l’espoir d’une gratuité inaccessible, ou céder au système parallèle imposé par les circonstances ?
Une chose est sûre : cette situation mérite une attention urgente des autorités. Rendre les documents administratifs gratuits est une décision salutaire. Encore faut-il qu’elle soit respectée sur l’ensemble du territoire.
Foromo Fazy Béavogui, depuis N’Zérékoré