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KAMSAR-CBG : attention au syndrome de Fria

Les violentes manifestations qui ont secoué la commune de Kamsar  en mai dernier sont l’expression d’un danger imminent qui guette cette ville et toute la région de Boké,  celui de la fermeture de la CBG, la plus grande entreprise du pays.

En mai dernier, des manifestations violentes ont éclaté dans la sous-préfecture de Kamsar pour réclamer la fourniture d’électricité dans la banlieue de la commune urbaine. Les échauffourées qui ont opposé les jeunes aux forces de l’ordre sont la énième illustration de l’essoufflement de la compagnie des bauxites de Guinée à jouer à l’Etat dans cette partie de la Guinée. Kamsar et Sangarédi ont été bâtis autour la CBG, depuis sa création en octobre 1963 et le début de ses activités dix ans plus tard. Cette entreprise, la plus grande du pays n’a cessé de faire vivre ces deux localités,  ainsi que d’autres circonscriptions relevant de la préfecture de Boké. Fournissant gratuitement eau et électricité aux habitants de Kamsar et de Sangarédi, dans un pays ou ces deux services quasiment inexistant, relève d’une générosité sans commune mesure. Cette situation  perdure encore aujourd’hui mais pour combien de temps ? Dans un pays organisé, la fourniture des services sociaux de base ainsi que d’autres activités comme la sécurité et la défense relèvent du régalien de l’Etat. Mais en Guinée, l’exécutif a sous-traité cette partie de ses prérogatives à la CBG qui paie ainsi la charge phénoménale de la fourniture de l’électricité. Il n’existe aucune présence de la Guinéenne de l’électricité (EDG) à Kamsar et Sangarédi. De la production à la distribution de l’eau et de l’électricité, les infrastructures appartiennent à la CBG. Comme l’a mentionné dans son livre, l’ancien directeur général de la compagnie Kemoko Touré, l’achat d’un groupe électrogène, il y a quelques années, d’une valeur de 2.500.000 dollars américains par la CBG avait permis de doubler la capacité de production de la centrale thermique de Kamsar. Sans compter les milliards de francs guinéens investis dans l’achat de carburant et l’entretien des installations de la centrale électrique.

La situation n’a que trop duré. La sous-traitance des domaines régaliens de l’Etat à des entreprises privées n’a pas commencé aujourd’hui. Elle fait croire aux populations riveraines que c’est à ces entreprises que revient la fourniture de l’eau et de l’électricité surtout. C’est le cas de la SAG à Siguiri où à la suite d’une violente manifestation en 2007 pour le courant, cette entreprise s’est engagée à fournir régulièrement l’électricité à la ville de Siguiri. Une agglomération de plus de 200 000 habitants. C’est également le cas de tous ceux qui ont exploité l’usine d’alumine de Fria. De français Pechiney au russe RUSAL, c’est toujours l’usine qui a alimenté la ville de Fria en eau et en électricité.

La non redistribution équitable des richesses issues de l’exploitation minière fait que les populations riveraines bénéficient peu ou pas du tout des retombées et pensent que c’est en s’attaquant aux exploitants sur place qu’elles peuvent mieux jouir des fruits de leurs mines. Malheureusement, en agissant de la sorte, elles multiplient les charges de ces entreprises et augmentent ainsi les risques de fermeture ou de plan social de celles-ci.

L’activité de la CBG n’est pas à l’abri des soubresauts qu’a connus RUSAL à Fria. Ces compagnies dépendent exclusivement du dynamisme du marché de l’alumine et de l’aluminium à l’international. Or, il suffit qu’une grave crise à l’image de celle  que nous traversons maintenant, éclate pour que le prix de la bauxite et de ses dérivées chute drastiquement. Aujourd’hui c’est le cas malheureusement. Le marché de l’aluminium qui booste l’exportation de la bauxite est en difficulté au vu de la baisse des activités du secteur automobile et aéronautique, principales débouchées de la vente de notre terre rouge. Il faille constamment avoir cela à l’esprit.

Si les enjeux de développement d’une localité quelconque doiventt reposer principalement sur les épaules d’une entreprise fut-elle la plus grande du pays, il est clair que l’avenir de cette localité est menacée à moyen terne.

La Guinée risque gros en laissant la CBG devenir la vache laitière de l’Etat dans la zone de Boké. Naturellement, les populations de Sangarédi et de Kamsar seront les plus grands perdants si un jour cette compagnie devrait fermer. Chez RUSAL, c’est la chute du prix de l’alumine et de l’aluminium, le coût faramineux de la maintenance de Kimbo, la facture salée de l’eau et de l’électricité ainsi que les actes de sabotage qui ont eu raison de l’usine de Fria.  Les revendications fantaisistes de salaires ont précipité la fermeture de l’usine qui n’était plus rentable aux yeux de son exploitant.

A Kamsar, la même situation est à redouter même si pour le moment l’on ne peut crier au désastre. Les actes de vols et de vandalisme subis régulièrement par la CBG constituent des poches de dépenses inutiles qui font saigner les finances de l’entreprise. D’après Kemoko Touré, les vols et détournements font perdre à l’entreprise la bagatelle de 20 millions de dollars par an soit près de 200 milliards de nos francs. A cela s’ajoute le cout faramineux de l’entretien des installations qui tourne autour de 25 millions de dollars dont 6 millions pour couvrir les frais de location du chemin de fer , les citées de Sangarédi et de Kamsar ainsi que l’hôpital de Kamsar que l’entreprise paie à l’ANAIM(Agence Nationale d’Aménagement des Infrastructures Minières). Or, dans son livre, l’ancien DG de la compagnie n’a cessé de rappeler la dette de la compagnie vis-à-vis des banques étrangères  dont les représentants ont d’ailleurs séjourné à Kamsar au début de cette année. Au vu de ces performances mitigées ces dernières années, il est important que l’Etat joue son rôle dans cette préfecture de Boké en récupérant simplement ce qui lui revient de droit. Les populations de Kamsar surtout doivent aussi comprendre que les réserves bauxitiques s’épuisent tous les jours que Dieu fait et qu’elles ont intérêt à sauvegarder les acquis laissés par la CBG. C’est vers l’Etat et lui seul que leur colère doit être dirigée. Sinon, ils risquent de faire face à l’inéluctable situation qu’a connue Fria  durant 6 longues années. C’est un cri d’alarme avant que ce ne soit trop tard.

Alpha Oumar DIALLO

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