Sans préjuger des tenants et aboutissants d’un dialogue en Guinée et à titre d’universitaire, dans la présente tribune, nous allons examiner tour à tour le profil idéal d’un médiateur, les précédents positifs puisés en Afrique et l’idéal portrait qu’offre Son Eminence Cardinal Sarah.
L’engagement en faveur du peuple et l’unanimité au sein de la population comme profil idéal d’un médiateur
Lorsqu’il est question d’aller loin et arriver à bon port, l’adage nous enseigne qu’il faut miser sur la bonne monture. Il en est de même lorsqu’il s’agit de s’engager dans un processus de dialogue véritable – pour quelque objectif qu’il soit. La personnalité de celui qui préside aux destinées des assises est essentielle pour leur réussite. Cette personne doit avoir démontré son engagement en faveur du peuple et il doit jouir d’une certaine unanimité au sein des parties en débat. Il lui sera ainsi aisé d’engager et mener à bon port le processus avec sérénité sans suspicion de partialité et les décisions qui en seront issues pourront s’imposer à tous. Ces aspects ne sont pas sortis ex nihilo mais résultent de l’observation des faits historiques en Afrique.
Les précédents positifs de la RDC, du Togo et de l’Afrique du Sud
L’histoire récente nous enseigne que des prélats ont joué un rôle essentiel dans la consolidation de la démocratie et des droits de l’homme dans leurs pays à des moments cruciaux de leur évolution. Il nous sera loisible d’en citer quelques uns pour illustration. En République démocratique du Congo (RDC), le Cardinal Laurent Monsengwo (1939-2021), Archevêque de Kisangani, a répondu présent à chaque fois que son pays eut besoin de ses services. Il en a toujours été de même lors des transitions démocratiques des années 90 avec le Président Mobutu que tout récemment avec le Président Kabila. Le père de la démocratie béninoise demeure, sans aucun doute, le Cardinal Isidore de Souza (1934-1999), Archevêque de Cotonou. Il a présidé avec sagesse et retenue la conférence nationale souveraine qui a remis le Bénin sur les rails avec d’institutions constitutionnelles solides et un climat social apaisé. La beauté de la nation arc-en-ciel collée à l’Afrique du Sud est tributaire de l’action de l’Archevêque anglican du Cap, Monseigneur Desmond Tutu (1931). Il a professé la paix, introduit le concept ubuntu (le vivre ensemble) et présidé avec brio la Commission Vérité et Réconciliation, citée en exemple de réussite pour la justice transitionnelle. Ces trois personnages ont pour base commune l’unanimité parmi leurs compatriotes et l’engagement de servir loyalement leurs peuples. Les exemples dessus sont loin d’épuiser ces consciences morales de leur peuple. Le Cardinal Sarah n’offre-t-il pas le même portrait pour notre pays, la Guinée, à l’instar de ses collègues ci-haut cités ?
Le Cardinal Sarah : l’idéal médiateur pour un véritable dialogue guinéen
Au regard de ce qui précède, Son Eminence Cardinal Sarah (1945), ancien archevêque de Conakry, offre le portrait idéal d’un médiateur dans le cadre d’un processus véritable de dialogue en Guinée pour les raisons qui suivent. Du point de vue de l’engagement en faveur du peuple, les actions du Cardinal Sarah sont lésion. Lors du premier régime, il n’a pas hésité à prendre position en faveur du respect des droits de l’homme en Guinée. Pendant le second régime, il s’est toujours tenu à côté du peuple de Guinée en dénonçant les violation des droits de l’homme et en appelant à l’instauration d’un Etat de droit. Les Guinéens ont encore en mémoire son mémorable discours à la nation avant de rejoindre sa nouvelle affectation à Rome. Ce sont de telles actions qui accordent au prélat guinéen l’onction de l’unanimité qui traverse et transcende toutes les divergences de nature ethnique, politique et religieuse.
-Juris Guineensis No 12.
Conakry, le 1er septembre 2021
Dr Thierno Souleymane BARRY,
Docteur en droit, Université Laval/Université de Sherbrooke (Canada)