Finalement, le procès sur le massacre du 28 septembre ne nous dévoilera pas que la responsabilité des uns et des autres dans ces odieux événements. Il nous restituera aussi au détail près les péripéties de l’accession et de l’exercice du pouvoir par la junte du CNDD. Ainsi, si le capitaine Moussa Dadis Camara a toujours publiquement prétendu que c’est Dieu qui donne le pouvoir, Marcel Guilavogui a néanmoins profité de son interrogatoire de ce lundi 17 juillet, pour révéler que l’ancien président du CNDD avait aussi recouru à d’autres forces qui ne sont pas divines. Des démarches qu’il a menées notamment avant la mort de Lansana Conté. Comme pour confirmer ce que disait déjà Aboubacar Sidiki Diakité alias Toumba, à savoir que Dadis a désespérément cherché le pouvoir.
A en croire Marcel Guilavogui, dans le cadre de la quête du pouvoir, lui et Moussa Dadis ont parcouru le pays, consulté les meilleurs devins et fait les plus improbables offrandes qui soient. « J’ai beaucoup voyagé avec le capitaine (Moussa Dadis, ndrl), accompagnés de deux ou trois personnes que je ne vais pas nommer ici », dit-il. Ils se seraient notamment rendus dans des lieux où seuls les Tomas ou les « hommes initiés peuvent entrer ». Des « lieux de fétiches », précise-t-il
« Nous sommes parti à Koulé et à Pela, des petits villages d’une sous-préfecture où on a fait un petit sacrifice. A Koulé, c’est moi qui ai tiré ce sacrifice. J’ai tiré trois coups de PMAK pour l’annonce du pouvoir. C’était au temps de Lansana Conté. A Pela, on a mangé le sacrifice à deux, capitaine Dadis et moi. Ce féticheur lui a demandé de venir le voir, un mois après son accession au pouvoir, pour qu’il puisse faire des travaux pour lui. Mais il (Dadis, ndlr) n’a pas respecté ce que le féticheur lui a dit. On est (aussi) allé à Yeriyé, un petit village de la forêt », a détaillé Marcel Guilavogui.
Dans la même veine, l’ancien garde de corps de Moussa Dadis Camara a confirmé le pacte que lui, Moussa Dadis lui-même, Toumba Diakité et un certain commandant Escobar auraient conclu sous la supervision de Foromo. Un pacte dont le principal bénéficiaire était, selon Marcel, le capitaine Dadis, dans la mesure où il était question de la préparer à la succession de Lansana Conté. « On avait confiance en lui, on a abandonné tous les autres pour le suivre. Mais l’homme est un inconnu connu », en vient à conclure Marcel
Porté sur le populisme, Moussa Dadis aurait notamment péché par une certaine suffisance. « Il est la seule personne qui connaît tout, il n’écoute pas les conseils. Il s’est fait entourer d’inconditionnels parachutés pour se remplir les poches », accuse Marcel. Et au nombre de ses compagnons opportunistes qui auraient perdu Dadis, il cite Moussa Tiégboro, le général Baldé, Makambo, Gono Sangarè, Théodore, etc. Un groupe dont personne n’était, selon lui, autour de Dadis lors de la phase de conquête du pouvoir, mais qui se sont subitement retrouvés autour de lui. « Le pouvoir ne marche pas avec cette idée. Le pouvoir c’est pour le peuple avant tout. Le capitaine Moussa Dadis Camara n’a dit que des contre-vérités », conclut l’ancien membre de la garde rapprochée.
Aminata Camara
