Lui et ses principaux collaborateurs sont demeurés étonnamment absents. Et c’est quelque chose qui se remarque et se démarque forcément. Que le président de la Transition n’ait été aperçu nulle part hier, alors que les Guinéens, dans leur ensemble, étaient mobilisés autour des sinistrés du drame de Kaloum, cela ne pouvait passer inaperçu. Son appel à la solidarité et à la prière a certes été relayé sur les réseaux sociaux et dans quelques médias. Mais eu égard à l’envergure du sinistre, cela ne saurait suffire.
C’est en soi l’illustration du décalage entre le colonel Mamadi Doumbouya des lendemains du coup d’Etat du 5 septembre 2021 et celui d’aujourd’hui. Il y a un peu plus de deux ans, en effet, confiant et célébré, le président de la Transition s’était rendu au chevet des malades alités à l’hôpital national Ignace Deen. Geste qui avait été alors perçu comme symbolisant la compassion et la solidarité du nouveau président à l’égard des faibles, des démunis d’entre ses compatriotes. On se rappelle en particulier de sa présence au côté de feue M’Mah Sylla, victime de viol collectif. Mais ce même Mamadi Doumbouya n’a été aperçu nulle part, en ce lundi 18 décembre, ni à l’esplanade de la mosquée Fayçal ou à celle du palais du peuple où sont hébergés les sinistrés, ni dans les structures sanitaires du pays où sont admis les blessés.
Ce n’est pas que la présence du colonel Doumbouya sur le terrain aurait fondamentalement changé grand-chose dans la gestion de la crise. Mais ç’aurait été un message symbolique. Comme son déplacement à l’hôpital Ignace Deen en octobre 2021, celui d’hier aurait reflété sa proximité avec les sinistrés, les blessés et ceux qui ont perdu les leurs. Plus qu’un message publié sur les réseaux sociaux, la présence du colonel au côté des victimes aurait incarné son désir de partager avec elles leurs peines et leurs douleurs et qu’à travers lui, c’est la nation entière qui leur témoigne sa compassion et sa solidarité.
Par ailleurs, le déplacement du président de la Transition sur le terrain aurait renvoyé un message d’assurance et de quiétude. On y aurait vu une nation qui, en dépit de l’affliction du moment, tient débout et un Etat qui fonctionne. Alors qu’au contraire, avec cette absence plutôt paradoxale, c’est la porte ouverte à toutes les spéculations quant à la sérénité au plus haut sommet de l’Etat. C’est dire que le choix qui a été fait n’était pas pour rendre service au pays et au président de la Transition lui-même.
Boubacar Sanso Barry